Égalité des genres grâce à l’école : fournir un environnement pédagogique sûr et inclusif
Les garçons comme les filles doivent se sentir les bienvenus dans un environnement pédagogique sûr et inclusif. Les gouvernements, les écoles, les enseignants comme les étudiants ont tous un rôle à jouer pour garantir que les écoles soient exemptes de violence et de discrimination, et fournissent une éducation de qualité, sensible à la dimension de genre (Figure 16). Pour y arriver, les gouvernements peuvent concevoir des cursus non discriminants, favoriser la formation des enseignants et veiller à l’adéquation des installations sanitaires. Les écoles ont entre autres responsabilités le devoir de lutter contre la violence en milieu scolaire et de proposer une éducation complète en matière de santé. Les enseignants doivent quant à eux respecter les normes professionnelles en matière de pratiques disciplinaires acceptables et adopter une conduite impartiale. De leur côté, les étudiants doivent se comporter de manière non violente et inclusive.
DES POLITIQUES NATIONALES ET SCOLAIRES DOIVENT CIBLER LA VIOLENCE SEXISTE À L’ÉCOLE
La violence à l’école est un problème omniprésent dans certains pays. Celle-ci peut aussi bien être physique que psychologique ou sexuelle ; elle peut avoir lieu dans l’enceinte de l’école, pendant les trajets ou dans le cyberespace ; elle peut prendre la forme de harcèlement moral, de châtiments corporels, de sévices verbaux et psychologiques, d’intimidation, de harcèlement et d’agression sexuelle, d’activités de gangs et de la possession d’armes parmi les étudiants. Elle est bien souvent perpétrée du fait de normes et de stéréotypes sexistes et dans le cadre d’un rapport de force inégal. Il a été estimé qu’à l’échelle mondiale, environ 246 millions de filles et de garçons ont eux à faire face à une forme de violence à l’école depuis 2014 (UNGEI, 2017).
Si la vaste majorité des enseignants sont des professionnels diligents faisant passer l’intérêt de leurs étudiants avant tout, certains abusent de leur position de pouvoir. Dans les pays d’Afrique de l’Ouest et centrale, l’abus et l’exploitation sexuels par les enseignants, le personnel de l’école et autres détenteurs de l’autorité, restent des pratiques communes (Antonowicz, 2010). La violence sexuelle est fréquente dans de nombreuses écoles d’Afrique du Sud mais ces crimes font rarement l’objet d’une enquête et de poursuites judiciaires (HRW, 2016). En République unie de Tanzanie, plus de la moitié des jeunes filles et garçons à avoir subi des violences physiques ont identifié leur enseignant comme étant l’agresseur (HakiElimu, 2017). Au Samoa, 41 % des enfants interrogés en 2013 ont indiqué avoir fait l’objet de violence par leur enseignant (Office of the Ombudsman and NHRI Samoa, 2015).
Certains pays, notamment le Chili, Fidji, la Finlande, le Pérou, la République de Corée et la Suède, ont adopté des lois contre la violence dans les établissements scolaires (UNESCO, 2015c, 2017b). La loi anti-harcèlement adoptée par les Philippines en 2013 oblige toutes les écoles à adopter des politiques de prévention et de lutte contre le harcèlement. Elle fait explicitement référence au harcèlement sexiste, décrit comme un acte humiliant ou excluant une personne sur la base de l’orientation et l’identité sexuelles, perçues ou réelles. Et pourtant dans l’année qui a suivi, seules 38 % des écoles avaient adopté des politiques de protection des enfants et de lutte contre le harcèlement. Un faible résultat qui s’explique par un manque de communication et un cadre de suivi insuffisant. Face à cette situation, le département de l’éducation a formulé un mémorandum afin de clarifier les exigences de la loi, et œuvre actuellement à renforcer la capacité de mise en œuvre (UNESCO, 2015c).
La formation des enseignants et l’utilisation de codes de conduites peuvent participer à l’évolution des attitudes et des comportements. Au Soudan du Sud, le programme de l’UNICEF Communities Care s’est rapproché d’enseignants pour remettre en question les normes favorisant la violence sexuelle et ainsi améliorer dans une certaine mesure leur attitude et leur comportement (UNGEI, 2017). Le programme Doorways réalisé au Burkina Faso, au Ghana et au Malawi a formé des enseignants du primaire et du premier cycle du secondaire sur les droits et responsabilités des enfants, sur des pratiques d’enseignement alternatives, leur a transmis des compétences de base en matière de conseil et d’écoute, et les a sensibilisés au harcèlement sexuel à l’école et au code de conduite des enseignants (DevTech Systems, 2008; Queen et al., 2015). Le projet Communication pour le changement a formé des enseignants de la République démocratique du Congo à être les premiers intervenants lorsqu’ils sont témoins de violence sexiste à l’école. La part d’enseignants participants pour savoir comment éviter la violence sexiste à l’école est passée de 56 % à 95 % grâce à cette intervention.(C-Change, 2013).
Les codes de conduite des enseignants sont généralement rédigés par des syndicats du secteur afin d’orienter leurs membres. Ils font la promotion de la responsabilité professionnelle en donnant à leurs pairs un moyen de se considérer comme mutuellement responsable du respect des normes (Poisson, 2009). Une récente enquête d’Éducation Internationale a révélé que des codes de conduite des enseignants existaient dans 26 des 50 pays étudiés (EI, 2017). Une autre enquête portant sur 24 pays a découvert que selon plus de la moitié des enseignants, le code de conduite avait un impact très significatif sur la réduction des comportements inadéquats (McKelvie-Sebileau, 2011).
Ces codes de conduite peuvent être efficaces pour réduire la violence sexiste à l’école s’ils font explicitement référence à la violence et aux abus et proposent un système clair de signalement et des protocoles d’application.
En Mongolie, le Code de déontologie des enseignants d’établissements d’enseignement général et de maternelles comprend une section sur les normes éthiques applicables aux enseignants. Il y est mentionné que les enseignants doivent protéger la santé et le bien-être de leurs étudiants, notamment en ce qui concerne les abus sexuels, et doivent veiller à une participation égale et sans discrimination, notamment sexiste (Steiner-Khamsi and Batjargal, 2017). Le Kenya a prévu plusieurs sanctions pour les manquements à l’éthique professionnelle, avec notamment des peines de suspension de fonction et d’interdiction d’exercer. Les enseignants jugés coupables d’atteintes sexuelles à l’encontre des étudiants sont radiés (Kenya Teachers Service Commission, 2013). Néanmoins, lorsqu’ils existent, ces codes ne sont pas toujours bien diffusés. En Éthiopie, la mise en œuvre du code de conduite sur la prévention de la violence sexiste à l’école s’est avérée inégale. Certains membres du personnel auraient fait preuve d’un faible engagement envers le code, ou ne se le serait pas approprié (Parkes et al., 2017).
Les étudiants ont également la responsabilité de veiller à ce que leur comportement ne nuise pas au droit à l’éducation de leurs camarades (UNICEF and UNESCO, 2007). Les écoles mettent de plus en plus fréquemment en place des modèles de prévention pour apprendre aux étudiants des stratégies acceptables d’interaction avec leurs pairs (Horner et al., 2010). Ces modèles définissent des lignes directrices claires pour les étudiants et des pratiques cohérentes en ce qui concerne l’instruction, l’enregistrement des informations et le suivi à l’intention des enseignants et des autres adultes tels que le personnel de surveillance, les surveillants de la cour de récréation, les employés de la cafeteria et les volontaires parmi les parents et les membres de la communauté (Lewis et al., 2014).
Les étudiants ont plus de chance de faire preuve d’un comportement positif et de réduire les comportements négatifs après la mise en œuvre de programmes de ce type (Durlak et al., 2011). Un nombre grandissant de preuves établit un lien entre la qualité des compétences sociales et la réussite scolaire (Horner et al., 2010). Si ces codes de conduite sont principalement utilisés en Europe et en Amérique du Nord (Sklad et al., 2012), certains pays asiatiques, notamment Singapour, commencent à les adopter (Durlak et al., 2011).
DES INSTALLATIONS SENSIBLES À LA DIMENSION DE GENRE PEUVENT AUGMENTER LE TEMPS QUE PASSENT LES FILLES À L’ÉCOLE
Des installations sanitaires inadaptées aux filles pendant leurs règles pourraient avoir un effet néfaste sur leur assiduité. Sur 145 pays proposant des données sur le sujet, l’accès à des installations sanitaires de base était inférieur à 50 % dans 28 pays, dont 17 en Afrique subsaharienne. En ce qui concerne les installations séparées pour les filles, les données disponibles restent limitées, sans même parler du caractère opérationnel ou de l’entretien de celles-ci. Dans seulement 9 pays sur 44, plus de 75 % des écoles primaires ont des installations séparées ; un chiffre qui tombe en dessous de 5 % au Bénin et aux Comores. Selon certaines estimations, une jeune Africaine sur dix manque l’école pendant ses règles (HRW, 2016).
Des réglementations exigeant des toilettes séparées pour les garçons et les filles peuvent atténuer le problème. Néanmoins, l’analyse des réglementations de 71 systèmes éducatifs par l’équipe du Rapport mondial de suivi sur l’éducation a démontré que seuls 61 % d’entre eux exigent des toilettes séparées pour les écoles publiques et 66 % pour les écoles privées (UNESCO, 2017a).
Seules, les réglementations ne suffisent pas à assurer qu’une quantité acceptable d’installations de ce type soit disponible. Bien que des installations sanitaires séparées soient obligatoires selon les réglementations du Bangladesh, une étude a révélé qu’en 2014, seules 12 % des filles faisaient état de toilettes unisexes avec de l’eau et du savon. Combiné au manque de poubelles, la médiocrité des installations contribue à l’absentéisme des filles pendant leurs règles. Deux filles sont cinq ont été absentes à cause de leurs règles pendant en moyenne trois jours par cycle (Alam et al., 2014). Des jeunes filles de Haïti ont déclaré devoir rentrer chez elles pour changer de protection hygiénique, résultant en une perte de temps de formation (HRW, 2016).
Les inspections jouent un rôle crucial pour garantir que les écoles se plient à ces réglementations. Néanmoins, elles ne prennent pas toujours en compte les problèmes relatifs au genre. En Suède, l’égalité des genres est prise en considération par l’inspection scolaire (Heikkilä, 2016) et au Royaume-Uni, les inspecteurs évaluent l’égalité des opportunités dans les classes et si l’école offre un environnement inclusif pour les garçons comme pour les filles (Rogers, 2014). Au Bangladesh par contre, les problèmes relatifs au genre sont rarement pris en considération lors des inspections, et les installations sanitaires unisexes rarement contrôlées (Chatterley et al., 2014). Dans tous les cas, les inspections sont sévèrement mises à mal par le manque de ressources de nombreux pays pauvres. Dans le district de Mvomero en République unie de Tanzanie par exemple, bien que 80 % des écoles soient supposées être inspectées une fois par an, seule une école sur cinq a été contrôlée en 2013 (Holvoet, 2015).
L’ÉGALITÉ DES GENRES DANS L’ÉDUCATION NÉCESSITE DES CURSUS ET DES MANUELS IMPARTIAUX
Pour favoriser une éducation tenant compte du genre, les cursus et les manuels doivent être exempts de préjugés sexistes et promouvoir l’égalité dans les relations entre les genres. La manière dont les étudiants se perçoivent et dont ils projettent leur rôle dans la société est façonnée dans une certaine mesure par ce qu’ils découvrent à l’école, y compris par leurs représentations dans les manuels.
Éducation sexuelle complète
Les programmes d’éducation sexuelle complète en milieu scolaire permettent aux enfants et aux jeunes d’acquérir des connaissances, des compétences et des attitudes favorisant leur autonomie. Dans de nombreuses situations, les programmes sont presque exclusivement axés sur le VIH et visent à retarder les premiers rapports sexuels ainsi qu’à réduire le nombre de partenaires sexuels et la fréquence des rapports (Fonner et al., 2014). Cependant, les normes et directives internationales, ainsi que les données émergentes sur les facteurs qui influencent l’efficacité des programmes, mettent de plus en plus l’accent sur l’intérêt d’une approche globale, axée sur le genre et les droits de l’homme (Ketting et Winkelmann, 2013). Un examen de 22 études montre que les programmes d’éducation sexuelle complète qui abordent les relations de pouvoir entre les sexes sont cinq fois plus susceptibles que les autres de réduire les taux d’infections sexuellement transmissibles et de grossesses non désirées (Haberland, 2015).
En 2009, l’UNESCO et d’autres organismes des Nations Unies ont publié les Principes directeurs internationaux sur l’éducation sexuelle, qui fournissent une série de thèmes et d’objectifs d’apprentissage fondés sur des données probantes et adaptés à l’âge pour les programmes d’éducation sexuelle complète destinés aux enfants et aux jeunes âgés de 5 à 18 ans (UNESCO, 2009). En 2010, la Fédération internationale pour la planification familiale a adopté une approche fondée sur les droits dans son Cadre pour une éducation sexuelle intégrée et le Bureau régional de l’Organisation mondiale de la Santé pour l’Europe a publié les Standards pour l’éducation sexuelle en Europe, un cadre destiné aux responsables politiques et aux autorités éducatives et sanitaires (Bureau régional de l’OMS pour l’Europe et BZgA, 2010). Près de dix ans après le rapport d’origine, la version révisée des principes généraux de l’UNESCO s’est étoffée pour couvrir à la fois les programmes scolaires et extrascolaires, en mettant un accent marqué sur les droits de l’homme, l’égalité des genres et le renforcement des compétences. Ces principes généraux peuvent servir aussi bien comme outil de plaidoyer que de responsabilisation pour les responsables de programme, les ONG et la jeunesse (UNESCO, 2018).
Une étude menée en 2015 sur le statut de l’éducation sexuelle complète dans 48 pays montre que près de 80 % disposaient de politiques ou stratégies de soutien. Malgré cette volonté politique, l’écart entre les politiques et leur mise en œuvre reste important (UNESCO, 2015b). En Afrique de l’Ouest en en Afrique centrale, l’Outil d’examen et d’analyse de l’éducation sexuelle de l’UNESCO a été utilisé pour évaluer 10 programmes nationaux d’éducation sexuelle sur 13. Moins de la moitié de ces programmes répondaient aux normes internationales concernant le contenu adapté à tous les groupes d’âge, les normes sociales et en matière de genre étant les domaines les plus négligés (Herat et al., 2014 ; UNESCO et UNFPA, 2012).
Des études menées récemment au Ghana et au Kenya mettent en évidence des écarts en matière de contenu et d’enseignement. L’étude menée au Kenya porte sur 78 établissements secondaires publics et privés. Alors que 75 % des enseignants indiquent avoir enseigné l’ensemble des thèmes du programme d’éducation sexuelle complète, seuls 2 % des élèves déclarent avoir étudié l’ensemble de ces thèmes. Seuls 20 % des élèves ont étudié les différents types de méthodes contraceptives et ils sont encore moins nombreux à savoir comment les utiliser et où les obtenir (Figure 17). Dans certains cas, des informations incomplètes, voire parfois erronées, ont été transmises. Près de 60 % des enseignants ont indiqué à tort que les préservatifs seuls n’étaient pas efficaces pour prévenir la grossesse (Sidze et al., 2017). De plus, 71 % des enseignants ont présenté l’abstinence comme la meilleure, voire la seule, méthode permettant de prévenir la grossesse et les maladies sexuellement transmissibles, et la plupart ont décrit la sexualité comme une pratique dangereuse ou immorale pour les jeunes.
Parmi les obstacles à la mise en œuvre efficace des programmes complets figurent le manque d’enseignants correctement formés, le soutien insuffisant aux écoles, la fragilité de la réglementation et du contrôle de la mise en œuvre des politiques, l’opposition des groupes religieux et conservateurs, et le tabou culturel qui entoure la sexualité. Dans le cadre de l’étude menée au Ghana, 77 % des enseignants ont indiqué manquer de ressources ou de supports pédagogiques. Une proportion plus faible a fait état de conflits, d’une gêne ou d’une opposition de la communauté ou des élèves pour des raisons morales ou religieuses (Awusabo-Asare et al., 2017).
Les manuels traitent plus fréquemment de la question du genre mais les progrès restent insuffisants.
Des rapports soumis spontanément par les gouvernements de Cuba, d’Espagne, d’Estonie, de Finlande, du Mexique, du Nicaragua et de Slovénie indiquent que l’égalité des genres est intégrée dans les cursus des écoles nationales (UN Human Rights Council, 2017). Le ministère de l’Éducation, de la Culture, de la Science et des Sports de Mongolie a identifié le respect de l’égalité des genres comme une valeur clé de son nouveau cursus de base (Steiner-Khamsi and Batjargal, 2017).
Au cours des 50 dernières années, les femmes et leurs droits ont été de plus en plus fréquemment mentionnés dans les manuels (Bromley et al., 2016; Nakagawa and Wotipka, 2016). Néanmoins, dans de nombreux pays, les femmes restent sous-représentées ou, quand elles le sont, reléguées à des rôles traditionnels de ménage ou maternels (UNESCO, 2016a). En 2006–2007, les femmes n’apparaissaient que sur 37 % des images des manuels du primaire et du secondaire en République islamique d’Iran (Paivandi, 2008), et sur neuf manuels d’histoire en Jordanie, seules 21 % des images comprenaient des femmes. De la Suède à la République arabe syrienne, bien que les gouvernements aient explicitement souligné l’importance de l’égalité des genres dans les manuels, les femmes et les hommes étaient encore fréquemment représentés de manière stéréotypée (Bromley et al., 2016).
Les gouvernements comme la société civile peuvent agir pour réduire la présence de préjugés dans les manuels. Le Conseil des droits de l’homme a clairement énoncé que les états ont l’obligation d’« examiner et réviser régulièrement les programmes scolaires, les manuels et les programmes et méthodes d’enseignement afin d’en éliminer les stéréotypes sexistes préjudiciables » (UN Human Rights Council, 2017). Certains États ont également inclus une analyse des genres à leurs processus de création et d’examen des manuels. Au Viet Nam, la Stratégie nationale sur l’égalité des genres pour 2011–2020 précise que les contenus des manuels doivent subir un examen pour garantir qu’ils ne contiennent pas de stéréotypes sexistes (UNESCO, 2016c). Au Ghana, la politique de développement et de distribution des manuels de niveau préuniversitaire considère la sensibilité au genre comme l’un des principaux critères à évaluer dans un manuel.(Ghana MOE, 2001) En comparaison, la politique et le plan d’action relatifs aux manuels et au matériel d’apprentissage du Pakistan ne mentionnent pas le genre comme étant un critère à examiner, évoquant plutôt la « qualité du contenu, la présentation, le niveau de langue et la couverture spécifique à la province » (Pakistan MOE, 2007).
L’examen des manuels par les parents et la société civile peut également s’avérer efficace. En Afrique du Sud, une question d’un parent diffusée sur Facebook en juillet 2016 a abouti à une pétition qui a amené un éditeur de manuels scolaires à modifier des contenus invitant à blâmer les victimes d’agressions sexuelles et à s’excuser (Davies, 2016).
LA FORMATION DES ENSEIGNANTS PEUT AIDER À LUTTER CONTRE DES PRÉJUGÉS SEXISTES PROFONDÉMENT ANCRÉS
Outre l’influence des manuels et des cursus officiels, la pratique des enseignants dans la salle de classe est partiellement façonnée par leurs présomptions et stéréotypes sur les genres, qui à leur tour influent sur les convictions et les apprentissages des étudiants. En Australie, les enseignantes se sont senties beaucoup plus responsables des échecs scolaires des garçons qu’elles encadrent que leurs pendants masculins (Hodgetts, 2010). Aux États-Unis, l’anxiété exprimée par les enseignantes de mathématiques a été associée à la conviction des étudiantes que les garçons sont meilleurs en mathématiques (Beilock et al., 2010).
La formation des enseignants peut aider les enseignants à réfléchir à leurs préjugés et à les surmonter. Des initiatives officielles de formation des enseignants se concentrant sur la question du genre ont été mise en œuvre en Italie, en République de Moldavie et au Soudan (OHCHR, 2015). En Espagne, l’université d’Oviedo exige des candidats aux postes d’enseignement qu’ils suivent un cours obligatoire sur le genre et l’éducation.(Bourn et al., 2017) À Ankara, Turquie, les enseignants en formation qui ont suivi une formation d’un semestre sur l’égalité des genres ont adopté des attitudes plus sensibles au genre (Erden, 2009).
Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, les programmes de formation des enseignants sont souvent financés de l’extérieur. Le Bureau régional de l’UNESCO à Bangkok a récemment financé un projet sur cinq ans dénommé « Renforcer le droit des femmes et des filles à une éducation de qualité par le biais d’une élaboration de politiques sensible à la question du genre, la formation des enseignants et la pédagogie », visant à former des participants du Cambodge, du Myanmar, du Népal, d’Ouzbékistan et du Sri Lanka à conduire des évaluations du respect de l’égalité des genres en matière de formation des enseignants (UNESCO, 2016b).
Dans la région de Karamoja, en Ouganda, le programme Socialisation entre les genres dans les écoles de l’UNICEF a formé plus de 1000 enseignants du primaire pour améliorer leurs connaissances, leurs attitudes et leurs pratiques en ce qui touche à la promotion de l’égalité des genres et à la résolution des conflits. La formation initiale s’étalait sur deux jours et était suivie de deux sessions de mise à niveau. Certains des enseignants ont également reçu des SMS de renfort leur rappelant des exemples de bonne pratique. Néanmoins, si le programme a amélioré les connaissances et l’attitude des enseignants en ce qui concerne l’égalité des genres, les pratiques en salles de classe ne sont pas devenues plus sensibles aux genres (American Institutes for Research and UNICEF, 2016; El-Bushra and Smith, 2016).
Le Nigeria a remis à jour son programme de formation des enseignants en 2012, en partie pour traiter les problèmes relatifs au genre (Unterhalter et al., 2015). Si une politique est en place pour assurer des normes minimales en matière d’égalité des genres, une enquête réalisée en 2014 auprès de 4 500 enseignants en formation a démontré que très rares étaient ceux à avoir une compréhension profonde de ce que pouvait signifier l’égalité des genres dans l’éducation, mais que nombre d’entre eux étaient hostiles à la participation des femmes à la vie publique et à toute forme d’engagement social. Parmi les répondants employés suite à l’obtention de leur diplôme, les enseignants ont rapporté n’avoir reçu aucune formation professionnelle sur le genre, un point confirmé par d’autres collègues des établissements dans lesquels ils travaillent. Les enseignants aux idées les plus égalitaires se considèrent comme les plus frustrés des répondants, et ont déclaré être incapable de donner vie à leurs idées (Unterhalter et al., 2017).
Les exemples de l’Ouganda et du Nigeria soulignent certains défis à relever pour changer les pratiques d’enseignement. Pour être efficaces, l’éducation et la formation des enseignants doivent être la cible d’efforts continus, en toute connaissance du temps nécessaire à l’évolution de ces pratiques. D’autres parties prenantes doivent également être invitées à participer pour contribuer à créer un environnement plus favorable.